lundi 12 janvier 2009

La table ronde annuelle de Barron's


Hang
on tigh
t! -- c'est ainsi que s'intitule cette année la traditionnelle table ronde * de Barron's. Ce titre en dit long sur l'état d'esprit des 10 experts qui se sont assis à la table des éditeurs du prestigieux hebdomadaire financier newyorkais pour faire leurs prédictions au sujet de l'économie et des marchés financiers en 2009.

D'année en année, cette fameuse table ronde est très attendue par les lecteurs de Barron's. J'en ai appris l'existence en lisant l'un des livres de Peter Lynch, Beating the Street. M. Lynch y participait à tous les ans du temps qu'il était le gestionnaire du fonds Magellan, chez Fidelity. De toute évidence, il ne prenait pas l'exercice à la légère, se préparant plusieurs semaines à l'avance afin d'être à la hauteur des attentes. Plusieurs pages de son livre rappellent ses passages à cette rencontre annuelle. J'en retiens une: la page 19 de l'édition de poche que je possède. Voici une traduction libre du paragraphe où il en est question:

Nous sommes un groupe d'observateurs du monde de l'investissement à nous rencontrer tous les mois de janvier pour participer à une discussion commanditée par le magazine Barron's, qui plus tard en publie la transcription. Si vous aviez acheté plusieurs des «stocks» que nous recommandions, vous auriez fait de l'argent, mais si vous aviez porté votre attention à nos opinions d'expert sur la direction du marché et de l'économie, vous auriez été tellement effrayés que vous n'auriez pas voulu posséder d'actions durant les sept dernières années.

Peter Lynch écrivait ce commentaire en 1993. Force est d'admettre qu'en 15 ans, les choses n'ont guère changé. Fidèles à la tradition, en 2009, les experts de la table ronde sont loin d'être optimistes pour les douze prochains mois -- et même, bien au-delà.

Fred Hickey, éditeur de The High-Tech Strategist, sonne la charge en disant que le gouvernement américain, malgré toutes ses tentatives, «ne peut soigner une maladie dont les premiers symptômes sont apparus il y a dix ans». Selon lui, les États-Unis ont donné naissance à «de gigantesques déséquilibres financiers, et des niveaux d'endettement jamais vu auparavant dans le monde».

Les dix experts sont à peu près unanimes à prédire que nous assisterons à un changement d'attitude chez le consommateur américain. Les États-Unis, croient-ils, deviendront une nation d'épargnants. De dépensiers impénitents, couverts de dettes, ils n'auront pas le choix de se mettre à économiser, de crainte de perdre leur emploi ou de ne pas avoir assez d'argent pour leurs vieux jours. Et les compagnies feront de même, sabrant encore plus dans leurs effectifs (surtout après Noël), coupant les dépenses en capital pour face au ralentissement économique.

Après cet épisode de «désendettement», le spectre de l'hyperinflation pointe à l'horizon. Hickey brandit même des photocopies de marks allemands de la République de Weimar, sans aucune valeur aujourd'hui, en laissant entendre que le dollar américain n'est pas à l'abri d'un tel danger...

Dans un tel contexte, que faire? L'expert suggère l'or (pas seulement des certificats, de vrais lingots, c'est plus sûr...), de même que la nourriture. Mario Gabelli, de Gamco Investors, fait alors remarquer qu'«il y des gens qui retirent leur argent des banques, achètent des coffres, des fusils et de l'or». Le Suisse Felix Zulauf, fondateur de Zulauf Asset Management, en rajoute en disant: «Vous ne pouvez plus avoir de coffre dans une banque suisse, car elles sont déjà toutes louées».

Au travers de ces prédictions d'Apocalypse, Meryl Witmer, d'Eagle Capital Partners, avance timidement que, malgré tout, «c'est excitant d'être un «stock picker» ces temps-ci». Investisseur valeur dans le moule de Warren Buffett, elle propose quatre compagnies à acheter en 2009: Kaiser Aluminum (KALU), Allegheny Energy (AYE), Assurant (AIZ) et Discover Financial Services (DFS). Malgré son pessimisme, Hickey voit du potentiel dans Microsoft (MSFT), Cadence Design Systems (CDNS), Mkt Vectors Gold Miners ETF (GDX), Agnico-Eagle Mines (AEM, AEM-TSX), PowerShares DB Agriculture (DBA) et Ishares FTSE/Xinhua China 25 Idx (FXI).

Nous connaîtrons les suggestions des autres participants dans les prochaines semaines. Le vétéran Archie MacAllaster, président de MacAllaster, Pitfield, MacKay, annonce déjà ses couleurs: «Je ne peux pas croire que vous ne soyez pas capables de trouver une bonne chose à dire sur le marché, a-t-il lancé à ses collègues. Les mauvaises nouvelles sont déjà dans le marché. Les profits vont tomber durement, mais la bourse a tombé encore plus durement. Bien qu'il puisse être ardu de les trouver à cause des cours ratio/bénéfice qui sont difficiles à déterminer, il y a des occasions dont on peut profiter. Beaucoup de compagnies sont en vente bien en-dessous de la valeur au livre -- et plusieurs ont des dividendes élevés. Le marché boursier est l'endroit où il faut placer son argent, particulièrement les financières. Les entreprises se débarrassent de leurs dettes -- et cela va continuer -- mais de réelles occasions s'en trouvent aussi crées.»

Il n'y a pas que lui qui semble trouver de bonnes affaires en bourse. Mario Gabelli et Abby Joseph Cohen paraissent aussi convaincus que les actions se transigent présentement à des prix raisonnables. On s'en reparle...


* La première partie de la table ronde est accessible gratuitement en ligne sur le site de Barron's, mais je ne saurais dire pour combien de temps. Les parties I et II le seront publiées dans les deux prochaines semaines et je tenterai d'en faire la synthèse.

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