lundi 5 janvier 2009

Computer Modelling,un exemple convaincant


L'élue de mon premier «exposé» est une petite compagnie fondée en 1978, en
Alberta: Computer Modelling. Je dis «petite» parce que CMG (son symbole boursier sur le TSX) n'emploie guère plus d'une centaine d'employés et que son chiffre d'affaires annuel est bien en-dessous des 100 millions $. Sa capitalisation boursière d'à peine 127 millions $ (au cours de 7.25$ l'action) fait en sorte qu'elle échappe à l'écran-radar de la grande majorité des gestionnaires de portefeuille qui s'intéressent au marché canadien. C'est loin d'être un défaut et vous verrez pourquoi en poursuivant votre lecture.

Computer Modelling est un concepteur et fournisseur de logiciels et de services spécialisés qui cible l'industrie du pétrole et du gaz. Ses logiciels de «simulation de réservoir» permettent de visualiser en 3 et même 4D les nappes souterraines d'hydrocarbures, de façon à optimiser le processus d'extraction, autant au plan économique qu'environnemental. Plus de 340 compagnies pétrolières, firmes de consultants et instituts de recherche dans 45 pays utilisent les services de CMG qui, en plus de son siège social à Calgary, a des bureaux à Houston, Londres, Caracas et Dubai.

Sur son site web, CMG affirme être «maintenant le plus important fournisseur indépendant de solutions avancées de modélisation au monde». La compagnie entend maintenir sa position en continuant d'investir dans la recherche et le développement. En 2008, 6,4 M$ ont été investis en R&D, soit plus de 28% des revenus annuels (27,9 M$). C'est une augmentation importante par rapport aux 4,7 M$ investis l'année précédente (25% des revenus de 23,7 M$), qui s'explique du fait que CMG travaille présentement à la conception -- avec commercialisation prévue pour 2010 -- d'une nouvelle génération de logiciels plus performants, en association avec deux «majors», Shell et Petrobras. Un troisième partenaire, la CMG Reservoir Simulation Foundation, issu de l'Université de Calgary, est étroitement lié à la naissance de CMG et maintient toujours une participation dans la compagnie par le biais d'actions non-votantes.

Mais je vous vois venir: si CMG dépense autant d'argent pour la R&D, les profits risquent d'être minces. «Que les sceptiques soient confondus!» dirait un personnage célèbre... Outre ses dépenses de R&D, CMG requiert très peu de capital pour fonctionner. Pas de machinerie lourde à entretenir, pas d'immeubles à rénover, pas de dépenses en publicité et marketing, de sorte que sa marge bénéficiaire nette est historiquement très élevée (21 à 27% pour les cinq dernières années), de même que son retour sur l'avoir des actionnaires (39% en 2008, 41.5% en 2007, 28.4% en 2006). Et la cerise sur le sundae, son bilan est impeccable: 25.2 M$ (1.45$ par action) en liquidités sans endettement, en novembre 2008.

CMG, le «stock»

À ce stade-ci de la discussion, je vous imagine en train de penser: «Belle petite compagnie, mais qu'en est-il de sa performance boursière?» Et c'est là que ça devient réellement intéressant...

Introduite à la bourse de Toronto en 17 mars 1997 au prix de 1.75$ (en tenant compte du fractionnement 2:1 survenu fin juillet 2008), l'action a été malmenée en raison de la non-profitabilité de l'entreprise à ses débuts. En 2000, en raison de son statut de «penny stock», elle a même été retirée de la bourse de Toronto et transférée sur le TSX Venture Exchange. En octobre 2003, à la suite d'une série de quinze trimestres profitables consécutifs, le «purgatoire» a pris fin et l'action a réintégré le TSX.

Pas si mal après des débuts difficiles, mais à l'aube de 2004 les actionnaires qui avaient participé au PAPE (premier appel public à l'épargne) voyaient encore leur investissement se transiger dans le rouge (l'action valait 1.39$ à la clôture le 6 janvier cette année là). Vraiment pas de quoi pavoiser. Heureusement, c'est alors que les choses ont commencé à changer, avec l'annonce du premier dividende de l'histoire de la compagnie, le 10 février. Un dividende de 2 cents dont le versement trimestriel, confirmé quelques mois plus tard, conférait au titre un rendement qui n'a pas manqué d'attirer l'attention, si bien qu'il s'est mis à monter pour terminer l'année à un peu plus de 2$.

Et ce n'était que le début. Depuis cette première annonce, il y aura bientôt cinq ans, non seulement Computer Modelling n'a pas manqué un versement trimestriel, elle a fait encore mieux, en augmentant le dividende huit (8) fois et en récompensant la patience de ses actionnaires par quatre (4) substantiels dividendes extraordinaires. Voici la liste de ces «coups d'éclat»:

Hausses et dividendes extraordinaires

- Mai 2005: hausse de 25% à 2.5 cents + div. extra. de 10 cents.
- Mai 2006: hausse de 20% à 3 cents + div. extra. de 12 cents.
- Novembre 2006: hausse de 17% à 3.5 cents.
- Février 2007: hausse de 43% à 5 cents.
- Mai 2007: hausse de 50% à 7.5 cents + div. extra. de 9 cents.
- Février 2008: hausse de 33.3% à 10 cents.
- Mai 2008: div. de 10 cents + div. extra. de 12.5 cents.
- Août 2008: hausse de 20% à 12 cents.
- Novembre 2008: hausse de 17% à 14 cents.

Voilà pour les dividendes! Admettez que c'est assez impressionnant. En cinq ans, c'est pas moins de 1.465$ (un peu mieux que la valeur de l'action au début de 2004!) qui ont été retournés aux actionnaires par la compagnie. Sur les quatre derniers trimestres seulement, CMG a versé 52 cents. Pour une action se transigeant à 7.25$, cela donne un rendement de 7.1% (5.4% si l'on soustrait le dividende extraordinaire de 12.5 cents).

Et ceux qui favorisent les gains de capital ne sont pas en reste, le titre s'étant apprécié de plus de 400% pendant les mêmes cinq années. Vraiment surprenant quand on pense que le cours ratio-bénéfice est encore très raisonnable à 11.5 fois les bénéfices nets des quatre derniers trimestres. La direction pense probablement de même, car elle est très active à retirer des actions du marché présentement, en vertu d'un programme de rachat (son troisième du genre) qui doit s'achever le 20 février. C'est Peter Lynch, le légendaire gestionnaire du Fond Magellan, qui serait content, lui qui vantait les vertus des «buy backs» comme façon de retourner de l'argent aux actionnaires dans son fameux best-seller One Up on Wall Street.

Et l'avenir?

Bon. Je sais bien que j'ai pu paraître dithyrambique au sujet de CMG, mais admettez que la compagnie -- et l'action -- a bien fait. Il s'agit de savoir si cela va continuer, et ça, évidemment, c'est une autre paire de manches.

CMG répond favorablement à presque toutes les attentes que je peux avoir d'une compagnie. Je dis «presque» parce que je considère qu'elle est tout de même exposée aux aléas d'une industrie cyclique, celle des hydrocarbures, et qu'en conséquence il est difficile d'évaluer si elle pourra continuer à se montrer aussi généreuse dans le futur. Vous voyez où je veux en venir: à plus de 100$ US le baril de pétrole, il était facile pour ses clients de dépenser plus librement en haute technologie. Seront-ils aussi prodigues de leur argent au cours actuel de la ressource (environ 50 $US) ou même plus bas?

On peut aussi se poser d'autres questions. Sera-t-elle capable de maintenir son avantage concurrentiel? Pourra-t-elle protéger efficacement ses procédés et «secrets» industriels? Continuera-t-elle d'être gérée de façon aussi conservatrice? Sera-t-elle tentée de croître par acquisitions, avec les risques que cela peut comporter?

Je vous laisse trouver vos propres réponses. À vous de faire vos devoirs. Mon objectif était simplement de vous montrer, par cet exemple, le type de compagnie dont j'ai tracé le portrait dans mon premier article. Peut-être trouverez-vous des défauts à CMG, et si c'est le cas j'aimerais que vous les partagiez sur ce blogue. Ce que je souhaite, toutefois, c'est de vous avoir mis sur une piste au bout de laquelle vous trouverez, vous-mêmes, votre propre Computer Modelling. Et que vous ayez la discipline et la patience d'attendre que l'arbre regorge de fruits bien juteux!

5 commentaires:

  1. Bravo pour votre blog. Voilà un excellent début !

    Nous sommes impatients de lire vos prochains articles.

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  2. Enfin un premier commentaire! Et pas de n'importe qui: de l'équipe du site Les Daubasses de Benjamin Graham.

    Si il y en a qui se demandent, c'est quoi les «daubasses»: il s'agit de «tops» ou mégots de cigarettes.

    Pour faire une explication courte, l'équipe des Daubasses se spécialise dans la recherche d'actions qui ont atteint le fond du baril mais qui conservent malgré tout une valeur largement sous-estimée par le marché, une dernière »puff» comme on dirait chez nous.

    L'utilisation de cette expression est inspirée par le mot «scuttlebutt», d'abord utilisé par le célèbre gestionnaire de portefeuille Philip A. Fisher, dans son best-seller Common Stocks and Uncommon Profits, d'abord publié en 1958 chez Harper & Brothers et maintes fois réimprimé depuis lors. Une lecture que je ne saurais trop vous conseiller.

    M.F.

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  3. Merci de nous avoir fait découvrir cette cie, très bonne analyse. Je vais suivre sa progression avec intérêt. Bravo!

    ECCO

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  4. Exactement le genre de petite compagnies que j'aime et que je recherche.

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  5. Tant mieux! Revenez me voir souvent, il y en a d'autres comme celle-là...

    M.F.

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